Après son essai Les vertus de l’échec (2016), véritable succès de librairie, le philosophe français Charles Pépin (1973-) aborde La confiance en soi (2018). Dans cet essai didactique et accessible, Charles Pépin puise dans les textes des grands philosophes (Sénèque, Blaise Pascal, Sartre, Kierkegaard) mais aussi dans des exemples de la vie de personnalités telles George Sand, Madonna ou encore Yannick Noah. Rendant la philosophie accessible à tous, Charles Pépin montre de manière stimulante le chemin de la confiance en soi – qu’aucun des philosophes cités dans l’essai n’aura traité dans sa globalité mais dont la ou les pierre(s) apportée(s) par chacun d’eux construit peu à peu ce chemin qui nous est montré par Pépin. C’est au travers de 10 chapitres thématiques que Charles Pépin nous initie à la confiance en nous.
Dans cet extrait, c’est le chapitre 5 « Décidez » que nous évoquons. Charles Pépin explique comme il est important d’appréhender la différence entre choisir et décider, et comment quand cette différence est comprise, elle nous conforte dans notre liberté, notre confiance en nous :
« Choisir, c’est choisir logiquement, rationnellement, après un examen qui a réduit l’incertitude comme une peau de chagrin. Entre deux destinations de vacances, si l’une présente objectivement plus d’avantages que l’autre et correspond mieux à nos attentes pour un budget égal, nous allons la choisir. Nous n’avons alors pas besoin de véritable confiance en nous-mêmes : savoir réfléchir et calculer correctement suffit. Mais lorsque les deux destinations sont toutes deux attirantes pour des raisons différentes et qu’il n’y a pas d’élément objectif pour les départager, nous allons devoir décider. Choisir, c’est se reposer sur des critères rationnels pour armer le bras de son action. Décider, c’est agir avant de savoir. »
Mais pourquoi est-il si difficile de décider ?
« Nous sommes donc plus libres lorsque nous décidons que lorsque nous choisissons, parce que nous sommes ne sommes pas tenus d’obéir à des critères indiscutables. Mais cette liberté, souvent, nous perturbe. »
Utilisant toujours des exemples pouvant se prêter à tout un chacun, Charles Pépin évoque, dans ce chapitre sur la décision, l’exemple d’une jeune femme qui ayant reçu une proposition d’emploi séduisante, se trouve face à un dilemme. L’hésitation pour elle se porte sur le fait que son poste actuel, bien que devenu peu stimulant, lui apporte la sécurité intellectuelle et matérielle nécessaire, quand le poste qui lui est proposé est lui celui de ses rêves, mais dans un environnement plus risqué de jeune PME : elle sort de sa zone de confort et ses prises de risques peuvent impacter sa famille. Elle a beau peser le pour et le contre, la peur de se tromper la paralyse. Charles Pépin explique :
« Pourquoi cette jeune femme ne parvient-elle pas à décider si elle doit ou non accepter cette offre d’emploi ? Parce qu’elle vit mal l’incertitude. Consciemment ou inconsciemment, elle semble attendre qu’un logiciel de traitement de données analyse son cas, dessine son avenir et lui indique la bonne option. Ce logiciel n’existe pas. Et c’est ainsi que la vie est belle. Mais elle l’oublie. Nous avons tous tendance à l’oublier. Nous sommes paralysés par l’incertitude parce que nous oublions combien la vie serait terne si tout était certain, prévisible. Bien sûr, nous pouvons nous tromper. Bien sûr, les conséquences peuvent être pénibles. Mais cet aléa fait le sel d’une vie humaine. Si nous refusons la réalité de l’aléa, ce déni nous travaillera de l’intérieur en nous privant de notre lucidité, et de notre capacité à nous écouter. A l’inverse, si nous l’acceptons vraiment, nous trouverons paradoxalement le courage de trancher. Forts de cette lucidité, nous déciderons en conscience. Nous serons capables d’accueillir plus sereinement la possibilité inhérente à toute décision qu’elle ne soit pas la bonne. »
La confiance en soi, c’est savoir utiliser son intuition, ou encore cette forme de sagesse ou de philosophie. C’est aussi accepter les erreurs comme faisant partie du processus :
« Cette acceptation de l’incertitude est la première étape de cette métamorphose intérieure, de cette sagesse de la décision. Mais l’acceptation peut devenir un véritable consentement, et se changer alors en une forme particulière de plaisir, et peut-être même de joie. Nous pouvons aller jusqu’à aimer l’idée que notre décision puisse ne pas être la bonne. Car cette possibilité nous rappelle que nous avons eu l’audace de prendre une décision risquée et que la vie n’est pas une science exacte. Plus nous consentons à la possibilité de l’erreur, plus nous nous éprouvons comme des sujets libres, capables de trancher. Prendre confiance en soi, c’est apprendre à aimer sa liberté au lieu d’en avoir peur. Il y a une joie particulière à s’en sentir capable. »
Il ajoute :
« Cela ne signifie pas simplement qu’il faut avoir de la tendresse pour ceux qui ratent, mais que l’erreur est la manière proprement humaine d’apprendre. Faire des erreurs, et puis les corriger : ce n’est pas une manière parmi d’autres, c’est notre seule manière d’avancer. »
Pour plus d’enseignements sur la confiance en soi, l’oeuvre de Charles Pépin est disponible ici :